Est-il possible d'entrer dans le cinéma d'Akira Kurosawa (1910-1998) en dehors de tout concept ou de toute théorie cinématographique ? C'est la tâche que se donne Alain Bonfand dans ce présent essai. A travers le prisme de la citation d'Akira Kurosawa, dans son livre autobiographie (Comme une autobiographie, Paris, 1995) : « N'est-ce pas le pouvoir de la mémoire, qui donne son envol à l'imagination ? », Alain Bonfand réalise un essai pragmatique sur l'un des plus grands réalisateurs de cinéma, en portant un intérêt particulier au rôle que jouent la mémoire, les références historiques, mais également les techniques artistiques (sens des jeux de lumières, portrait des personnages et paysages etc.) dans ses films. En avançant de courts-métrages en courts-métrages, (Un soleil sous la pluie, Le château d'Araigné, La montagne rouge etc.) l'auteur entend montrer la manière qu'a Kurosawa d'être à la fois peintre dans l'âme tout en étant cinéaste.
Peut-on expliquer ce qu'est le cinéma ? Que demande-t-on au cinéma ? La réponse à ces questions ne serait-elle pas dans l'absence d'explication parce que le cinéma serait une sorte de saturation ? C'est de ce point de vue que se place Alain Bonfand : son essai s'intéresse de près au mouvement du cinéma en suivant le fil du phénomène saturé. Sous forme d'études de cas, cet ouvrage permet de montrer comment le cinéma lui-même résiste à toute forme d'analyse, puisque l'évènement même qu'il décrit à chaque fois échappe au concept. La peinture et l'image à travers les cinémas de Tarkovski, Godard et Lewin, le mouvement chez Kurosawa, l'esthétique chez Antonioni font apparaître, sous des traits phénoménologiques, la liberté de sur-interprétation propre au cinéma. Par son pouvoir de créer des images, le cinéma est comme une « saturation de signes » qui dépasse la peinture par l'image en mouvement et ré-ouvre la question du sublime.
Alain Bonfand est professeur d'esthétique et de théories de l'art à l'ENS des Beaux-arts de Paris.
« Avant d'entrer en philosophie, Alain Bonfand est d'abord historien.
Là réside l'originalité de sa démarche phénoménologique.
L'ombre de la nuit en est une démonstration singulière.
Alain Bonfand, usant d'outils revisités de la phénoménologie, explore un contraste inattendu. Paul Klee d'une part, artiste stigmatisé dès 1933 dont l'oeuvre à cette date est détourné par l'angoisse (motif exploré dans L'oeil en trop). Il lui oppose avec pertinence Mario Sironi, thuriféraire du fascisme alors que son oeuvre peint, visité par l'ennui des profondeurs, dément un tel engagement. L'auteur fait vivre, en opposant ces deux artistes, le primat de l'angoisse et de la mélancolie en ces années noires. » (J. Lichtenstein)
« Alain Bonfand a ordonné son érudition indiscutée à une méthode philosophique stricte. Il a pris le temps de se faire phénoménologue, en toute rigueur de termes. Husserl, Heidegger, Levinas et Henry l'ont conduit à reconnaître le tableau comme ce qu'il se donne, un phénomène. Phénomène d'autant plus phénomène, qu'il ne se destine, au contraire des phénomènes mondains qui pèsent encore de leur lest d'objets et d'étants, qu'à sa pure et totale apparition, sans réserve, ni retenue. Il s'agit de le recevoir comme un éclat d'insoutenable visibilité, qui surgit de son invu natif. Donc d'ouvrir en lui la croisée du visible qu'il donne avec l'invisible qui le soutient.
Écran surgi sans cause ni dessein, le tableau ajoute du visible au monde. Même, il s'ajoute au monde. C'est pourquoi nous ne pouvons pas le voir sans en subir le contre-coup. Il faut donc recenser ou du moins deviner les « tonalités fondamentales » qu'il importe en nous et pour lesquelles il nous importe. Il faudra assigner aussi à la mort, à la joie et, peut-être même à l'amour leurs visibles propres.
L'esthétique - ce masque jamais arraché sur la face neutre de la philosophie - se ravalerait au rang utile mais sans honneur de la documentation ou du commentaire, si elle n'osait pas penser ce qu'elle voit. Ou plutôt, si elle croyait voir ce qu'elle ne penserait pas. Alain Bonfand compte parmi ceux qui osent ce qu'elle doit. » (J.-L. Marion)
Une histoire de l'art qui s'enrichit de la phénoménologie, c'est une histoire de l'art qui accorde son attention à ce qui est « invu » : non pas ce qui est invisible, mais la manière dont l'oeuvre apparaît. Dès lors, la toile n'est plus regardée de l'extérieur mais de l'intérieur, et sa connaissance repose autant sur l'expérience que le spectateur en a que des textes produits par les artistes à propos de leur travail. Se penchant sur les toiles de Chirico, Picasso, Klee, Masson ou sur l'art abstrait, Alain Bonfand se ressaisit de la peinture comme phénomène et en livre une analyse philosophique basée sur une intime connaissance des oeuvres : ami d'André Masson, en contact étroit avec l'entourage de Paul Klee et ayant édité les écrits de Beckmann et de Sironi, il est le mieux à même de dresser une phénoménologie de leur oeuvre.
Avec Chu Teh-Chun et Zao Wou-Ki, Wu Guanzhong est un peintre du mélange de la tradition orientale et occidentale. De la même génération qu'eux (les années vingt), il est le seul à rester en Chine, après un séjour en France dans l'atelier de J.M. Souverbie en 1947. Il traverse donc les grands bouleversements politiques que subit son pays. Pendant la Révolution culturelle il est, comme tous les intellectuels, envoyé aux champs et une grande partie de son oeuvre qui précède cette période est détruite. Mais, dans la peinture comme ailleurs, tout ce qui ne vous détruit pas vous renforce. Ces années sombres lui permettent de renouer avec un sentiment et une connaissance de la nature qu'il traduira plus tard dans des encres magnifiques. Plus encore que Chu Teh-Chun et Zao Wou-Ki, il utilise l'énergie gestuelle si essentielle à la grande tradition de la peinture chinoise pour réinterpréter le monde en forces et en rythmes.
"Le regard d'un tableau à l'autre, d'un dessin à l'autre, est toujours un regard en exil, et ce regard retrouve le geste de Klee, ce geste en sursis où chaque forme retenue voudrait vivre une avant-dernière fois."Alain Bonfand
«Dans Richerenches déserte il regarde Clémence, et elle l'éblouit.» Nous sommes dans la Drôme, il est midi, il fait chaud, et l'amour de Clémence et de Jean est extrême : ils se quittent, pour que rien ne vieillisse, et pour que la peur de l'un cesse de peser sur l'autre. Jean, hébété et solitaire, rencontre Eva Weiden. Il l'a croisée dans une gare, il la retrouve, et leur amour est extrême. Peut-on aimer deux femmes ainsi, dans la lumière crayeuse de l'été, dans l'immobilité de la chaleur? L'une qui est là, l'autre qui n'y est plus? Jean n'a plus qu'Eva pour se ressouvenir de Clémence. Alors c'est Eva qui parle; elle prend en main le récit. Ainsi, quand Jean évoque une «hésitation» à laquelle il avait donné le nom de «Clémence», Eva lui dit: «Ton hésitation c'était moi.» Et quand Eva, durant cet interminable mois d'août, note ses rêves pour les raconter, chaque matin, à Jean, c'est encore elle qui lui dira: «Clémence a quitté son sommeil pour venir hanter le mien.» Le récit ne pourra s'achever qu'avec la mort de Zef, le témoin de toujours de la vie de Jean, à l'hôpital. Zef, devenu aphasique, trace, pour Jean seul, quelques mots à la craie sur une ardoise. Au fond, il n'y a qu'une question ici : le désamour fou est-il possible?
" Mon inspiration est née de ce que disent certains peintres ou écrivains, ou même des musiciens : Regarde avec tes oreilles, entends avec tes yeux. " Né en 1922 à Barbara en Inde, Sayed Haider Raza étudie la peinture à l'école des Beaux-Arts à Nagour avant de poursuivre sa formation à Bombay. En 1950 il vient étudier en France, s'éprend du pays, s'y installe et épouse Janine Mougillat, artiste, avec qui il vivra jusqu'au décès de celle-ci en 2002. Une fondation portant son nom a été inaugurée à Gorbio, petit village sur les hauteurs de Menton.
Première grande monographie en France sur l'oeuvre de Raza, le plus important artiste indien vivant, dont les oeuvres se trouvent dans tous les grands musées du monde. À la croisée de deux mondes : la tradition indienne des mandalas et l'art abstrait occidental.
" Sur la scène artistique, Raza occupe une place exceptionnelle ; par son enfance, sa première formation artistique, sa vaste culture [...] il appartient à son pays d'origine. Par ses attaches de quarante années de vie passées en France, il est de France, de l'école dite "de Paris", qui a su intégrer des artistes venus de tous les horizons de la planète en leur permettant de découvrir directement l'ensemble de l'art occidental. Peu à peu s'est précisée, à travers les années, [...] une oeuvre plastique à part entière. Le Bindu, le grand point noir, est bien ce d'où naît la genèse de la création, d'abord la lumière, puis les formes et les couleurs, mais aussi les vibrations, l'énergie, le son, l'espace, le temps. "
Alain bonfand est professeur d'esthétique et de théories de l'art à l'école nationale supérieure des beaux-arts de paris, où il dirige la collection " écrits d'artistes ", et membre associé de l'école doctorale " langages et concepts " à l'université de paris iv-sorbonne. romancier, il a publié, entre autres, à la différence : lettres d'août (1990), le rêve de la guerre (1990), le malheur (1991), la chambre du cerf (1992), le sang clair (2003) ainsi que de nombreuses monographies ou essais consacrés à des artistes, tels que mario sironi et paul klee (l'ombre de la nuit, 1993, éd. revue et augmentée 2005), lindstrom (1993) ou wu guanzhong (2007). il vient de faire paraître dans la collection " épiméthée ", aux presses universitaires de france, le cinéma saturé - essai sur les relations de la peinture et des images en mouvement.
Quand Paul retrouve la maison de son enfance, Léna l'a quitté depuis quatre ans.
Les arbres plantés par le père de Paul meurent, le jardin est envahi par les ronces. La maison perd son âme, se révèle être un départ paradoxal pour la solitude et l'abandon de tout repère ancien. Paul confie à Léna qu'il est atteint de la maladie de Wegener qui le laisse en sursis; Léna accepte alors de partir avec lui pour Lisbonne. Pourtant, malgré la présence de la femme aimée, voilà que les images disparaissent une à une, que se perdent la mémoire même de l'amour et sa nostalgie fondatrice.
Paul peu à peu sera rendu à une solitude qui prend alors une étrange couleur de destin. L'homme malade d'amour est une méditation romanesque sur le sentiment de la perte et l'irréalisable de toute relation amoureuse. Se battre contre l'oubli des blessures est-il un combat perdu d'avance ou conduit-il à une inéluctable rédemption?
L'auteur pose, depuis ses travaux sur Klee et sur toute l'abstraction, la question suivante : pourquoi les instaurateurs de cette peinture l'ont-ils pense sur un mode rsolument thorique, mieux un mode spirituel? Il ordonne son rudition une mthode philosophique stricte : celle de la phnomnologie.
Introduction, 3 Chapitre I - Un horizon spirituel commun, 5 I. Une première occurrence en esthétique du mot "abstraction", 6 - II. Kandinsky, 10 - III. Malevitch, 19 - IV. Mondrian, 26 - V. D'autres artistes aux mêmes dates, 34.
Chapitre II - L'abstraction fait venir au premier plan la considération du médium, 38 I. La question du tableau, 38 : 1. Kandinsky, 39 2. Malevitch, 45 3. Mondrian, 46 - II. Une fin du tableau, vers les arts appliqués, 50 : 1. De Stijl, 50 2. Le Bauhaus, 53 3. Le constructivisme, 57 : A) Du suprématisme au constructivisme, 57 B) La figure dominante du constructivisme : Tatline, 57 - III. L'abstraction dans les années 30, 63 : 1. "Cercle et Carré", 64 2. "Abstraction-Création", 65 : A) Herbin, 67 B) Delaunay, 67 C) Arp, 68 D) Schwitters, 68 E) Autres artistes, 69 3. Abstraction et figuration, hésitations et ambiguïtés, 72 : A) Magnelli, 73 B) Hélion, 73.
Chapitre III - Un changement de géographie, 76 I. Paris : une rhétorique de l'abstraction, 76 : 1. "L'École de Paris", 76 2. Un primat du geste, 77 : A) L'abstraction lyrique, 77 B) Aux marges : Atlan, Fautrier, Van Velde, 79 3. Le Salon des Réalités nouvelles, 82 4. Situation en Italie, Grande-Bretagne, Allemagne, 90 - II. New York ou l'idée de l'Art moderne, 91 : 1. Une nouvelle donne de l'abstraction, 91 : A) Dimension historique, 91 B) Dimension spirituelle, 93 C) Remise en cause du médium, 94 2. Des conditions historiques singulières, 95 3. Action Painting et Color-field, 98 : A) Action Painting, 99 B) Color-field, 106 4. Le triomphe du formalisme, 117 5. L'art minimal, 122.
Conclusion, 124 Bibliographie, 127