« Je conçois dans l'espèce humaine deux sortes d'inégalité, l'une, que j'appelle naturelle ou physique, parce qu'elle est établie par la nature, et qui consiste dans la différence des âges, de la santé, des forces du corps et des qualités de l'esprit, ou de l'âme, l'autre, qu'on peut appeler inégalité morale, ou politique, parce qu'elle dépend d'une sorte de convention, et qu'elle est établie, ou du moins autorisée, par le consentement des hommes. Celle-ci consiste dans les différents privilèges, dont quelques-uns jouissent, au préjudice des autres ; comme d'être plus riches, plus honorés, plus puissants qu'eux, ou même de s'en faire obéir. » Dans ce discours à portée réaliste, Rousseau nous livre ici ses idées : il n'est pas question comme le dénoncera Voltaire de retomber à quatre pattes, ni de retrouver un état de nature perdu à jamais, mais d'éclaircir l'enchaînement progressif qui vit un homme né libre être bientôt partout dans les fers.
Publication posthume du penseur de Genève, les Rêveries tiennent autant du journal autobiographique que de réflexions philosophiques. Ecrites durant les deux dernières années de sa vie, jusqu'à l'ombre des grands arbres du Château d'Ermenonville, Jean-Jacques prend à témoin le lecteur pour régler ses comptes, autant avec lui-même qu'avec ses détracteurs. Un texte poignant de poésie et de sensibilité.
La publication de l'Emile, en 1762, restitue au problème de l'éducation sa place centrale en philosophie.
De ses premiers mois jusqu'à la rencontre amoureuse, Emile est suivi dans chaque étape, à travers des expériences qui attestent d'abord le souci de considérer « l'enfant dans l'enfant », au lieu de le sortir de son âge. Rousseau montre qu'il est possible d'éduquer un homme selon la nature et de quelle façon les vices et l'inégalité caractérisent désormais la condition humaine : double enjeu qui constitue sa « théorie de l'homme ».
La richesse incomparable de ce maître-livre tient aussi aux tensions qui le parcourent. Rousseau refuse le péché originel mais il doit rendre raison du mal et de la souffrance que ce dogme interdisait d'ignorer; il critique les philosophes de son temps mais il pousse à ses limites leur méthode empiriste; il proclame: «je hais les livres», mais il fournit le panorama le plus juste et le plus instruit de la culture du XVIIIe siècle, en face de l'Encyclopédie et, pour partie, contre elle.
Parus ensemble, Emile et le Contrat social furent condamnés à Paris puis à Genève: la force du traité d'éducation n'échappa pas aux censeurs, même si Rousseau prétendait ne livrer que « les rêveries d'un visionnaire ». Car la forme même de la fiction arrache l'ouvrage aux circonstances : pas plus que ses lecteurs des Lumières, nous ne sommes à l'abri de ses leçons.
Sans cesse à magnifier et honorer la raison), autant qu'un lieu imaginaire, une utopie servant à mettre en scène ses idées philosophiques. best-seller de l'époque, où les libraires étaient contraints de louer l'ouvrage à l'heure pour satisfaire la demande.
Ce succès inattendu, inspirera à Laclos, quelque peu jaloux, ses " Liaisons dangereuses ".
Rousseau s'interroge dans cet essai moins sur l'origine des langues à proprement parler que sur le fondement de la parole entendu comme cause historique et sociale du surgissement des langues. Là où beaucoup, à l'époque, imagine dans la naissance du langage la réponse rationnelle à un besoin de communication pratique entre les hommes, Rousseau lui, y voit la pleine expression sociale du caractère sensible de l'être humain soumis aux passions. Sans nul doute cette oeuvre posthume laissée inachevée par l'auteur, trouve toute sa place aux côtés de son discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes.
En 1749, l'Académie de Dijon met au concours la question suivante : Si le rétablissement des sciences et des arts a contribué à épurer les moeurs. Alors qu'il va rendre visite à Diderot prisonnier à Vincennes, Rousseau feuillette le Mercure de France qui publie la question : « Si jamais quelque chose a ressemblé à une inspiration subite, écrira-t-il plus tard, c'est le mouvement qui se fit en moi à cette lecture ; tout à coup, je me sens l'esprit ébloui de mille lumières ; des foules d'idées vives s'y présentèrent à la fois avec une force et une confusion qui me jeta dans un trouble inexprimable. » Ces lumières subites, Rousseau nous les donne à murir dans ce discours qui remporta le premier Prix de l'Académie et le fit connaître du public. On y discerne déjà tous ses talents d'orateur et de grand théoricien.
« J'ai dit la vérité : si quelqu'un sait des choses contraires à ce que je viens d'exposer, fussent-elles mille fois prouvées, il sait des mensonges et des impostures ; et s'il refuse de les approfondir et de les éclaircir avec moi tandis que je suis en vie, il n'aime ni la justice ni la vérité. Pour moi, je le déclare hautement et sans crainte : quiconque, même sans avoir lu mes écrits, examinera par ses propres yeux mon naturel, mon caractère, mes moeurs, mes penchants, mes plaisirs, mes habitudes, et pourra me croire un malhonnête homme, est lui-même un homme à étouffer. » Ce dernier volume des Confessions de la collection Lyre Audio Classiques entame la descente aux enfers de Jean-Jacques de 1756 à 1765 : Retiré à l' Ermitage, petite maison construite à son intention par Mme d'Epinay à proximité de la sienne, loin du fast de la capitale, il rédige ses trois oeuvres majeures : « La Nouvelle Héloïse », qui remporte un succès littéraire sans précédent, « Le contrat social », et « L'Emile », qui attire sur lui les foudres de l'Eglise... Dans le même temps, le philosophe voit ses anciens amis conspirer à sa perte... De sorte que bientôt, contraint de s'exiler toujours plus loin, le voici « seul parmi les humains »...
En rupture de stock depuis quelques temps, voici une toute nouvelle édition des enregistrements de cette oeuvre magnifique, composée de l'intégrale des Confessions, suivie des Rêveries du Promeneur Solitaire, admirablement servie par toute la sensibilité de Philippe Bertin. Près de 30h d'écoute pour le plaisir du coeur et de l'esprit... BONUS INEDIT : mon portrait et notes écrites sur des cartes à jouer.
L'intérêt du livre audio ne se révèle jamais tant que par des lectures de lettres : l'auteur apparaît alors comme surgi d'outre-tombe.
La correspondance de Rousseau, monumentale par son ampleur (50 volumes publiés par l'institut Voltaire, nous a contraint à exhumer la sélection opérée par Marcel Raymond, la seule disponible à ce jour, réunissant quelques 140 lettres de sa jeunesse jusqu'aux derniers mois de sa vie. Toutes empreintes d'une grande diversité de style et de ton. Un complément indispensable à l'Intégrale des textes autobiographiques de Rousseau (Ed Lyre Audio 2008).
Rousseau... Artiste, Homme de Lettres et Philosophe autodidacte, il aura marqué son temps et le nôtre d'une empreinte indélébile. Fervent admirateur ou détracteur acharné, personne ne saurait rester indifférent à son style, encore moins à ses idées, qui animent toujours aujourd'hui les controverses les plus vives... Pour la première fois en livre audio, réunie dans son étui, cette oeuvre magnifique composée de l'intégrale des Confessions, suivie des Rêveries du Promeneur Solitaire, est admirablement servie par toute la sensibilité de Philippe Bertin. 27h d'écoute pour le plaisir du coeur et de l'esprit...
« Je forme une entreprise qui n'eut jamais d'exemple, et dont l'exécution n'aura point d'imitateur. Je veux montrer à mes semblables un homme dans toute la vérité de la nature ; et cet homme, ce sera moi. (...) Que la trompette du jugement dernier sonne quand elle voudra, je viendrai, ce livre à la main, me présenter devant le souverain juge. Je dirai hautement : Voilà ce que j'ai fait, ce que j'ai pensé, ce que je fus. » Ce premier volume des Confessions de la collection Lyre Audio Classiques nous fait revivre l'enfance de Jean-Jacques, de 1712 à 1731 : ses lectures en compagnie de son père, ses premières amours, sa fuite de Genève, sa rencontre avec « Maman », son entrée comme serviteur chez Madame de Vercellis, puis chez M. de La Martinière comme sous-secrétaire d'Ambassade... Mais ne pouvant supporter de rester longtemps sous quelque autorité, il obtient finalement de se faire renvoyer pour s'en retourner bien vite chez Madame de Warens...
« Affreuse illusion des choses humaines ! Elle me reçut toujours avec son excellent c ur, qui ne pouvait mourir qu'avec elle ; mais je venais rechercher le passé qui n'était plus, et qui ne pouvait renaître... A peine eus-je resté une demi-heure avec elle, que je sentis mon ancien bonheur mort pour toujours. » Ce deuxième volume des Confessions de la collection Lyre Audio Classiques, qui s'étale de 1732 à 1755, nous fait éprouver avec Jean-Jacques les délices de la vie aux Charmettes auprès de Madame de Warens et son intendant Claude anet, où le futur philosophe et hommes de lettres s'adonne pleinement aux Arts et aux Humanités. Il monte finalement à Paris. Il y rencontre alors la bourgeoisie intellectuelle : d'Alembert, Diderot, avec lesquels il participe à l'élaboration de l'Encyclopédie ; Voltaire, Rameau, avec qui il compose un opéra ; il se distingue ensuite comme Philosophe en remportant le prix du concours proposé par l'Académie de Dijon avec son Discours sur les Sciences et les Arts, avant de rencontrer Thérèse Levasseur...
« Je veux chercher si, dans l'ordre civil, il peut y avoir quelque règle d'administration légitime et sûre, en prenant les hommes tels qu'ils sont, et les lois telles qu'elles peuvent être. Je tâcherai d'allier toujours, dans cette recherche, ce que le droit permet avec ce que l'intérêt prescrit, afin que la justice et l'utilité ne se trouvent point divisées. [...] On me demandera si je suis prince ou législateur pour écrire sur la politique. Je réponds que non, et que c'est pour cela que j'écris sur la politique. Si j'étais prince ou législateur, je ne perdrais pas mon temps à dire ce qu'il faut faire ; je le ferais, ou je me tairais. » Inspiré par les écrits de Hobbes et de Montesquieu, ce petit traité aux principes atemporels, restitué dans toute sa force et sa clarté par la rigueur de diction d'Éric Herson-Macarel est un véritable bréviaire de citoyenneté. Étonnant de modernité, il devrait inspirer tous les citoyens soucieux du devenir de l'ensemble de la société humaine.