Qu'est-ce que je ressens, moi, décolonisé, quand je contemple une photo de cette époque, de ce passé qui, sur injonction, a été décrété contemporain-pour-toujours ? Qui suis-je dans ce miroir qui devrait me refléter, et qui cependant m'efface pour toujours au présent ?
Il me faut scruter les détails, objets, silhouettes, bosquets, magasins, automobiles, qui peuplent l'arrière-plan ; les ombres aussi. Je tente d'aileurs de faire irruption dans celui-ci. Je m'imagine réincarné en 1961 : debout dans un angle mort, penché à une fenêtre, traînant dans une rue d'Alger, jetant un regard anxieux sur une « roumia », crapahutant sur la colline pelée... J'invente ma propre possibilité de vivant à cette époque.
Raymond Depardon photographie ce qu'il voit à la jonction de ce qu'il ne voit pas. Je regarde ce que je ne vois pas, en croyant savoir ce que cela signifie. Son oeil dans ma main. Son corps est ma mémoire.
Ce qui m'intéresse chez le photographe, c'est son corps, son errance, son voyage : je me glisse en lui, j'épouse ses mouvements, son regard, sa culture, ses préjugés peut-être, mais aussi sa singularité. Errance de déclic en déclic.
Je deviens une monstrueuse et fascinante coïncidence. Une possibilité, même brève et limitée, d'omniscience.
Ne devrais-je pas, alors, éprouver un sentiment proche de la frayeur ?
En parcourant ces photos, arraché à mon millénaire, transporté vers un autre, je pourrais tressaillir violemment. Je pourrais hurler à la possession - hurler d'effroi et de gratitude.
« Ceci n'est pas un livre pour les musiciens, non plus que pour les non-musiciens ; il est destiné, plutôt, à l'esprit curieux désireux de découvrir les parallèles entre la musique, la vie, et cette sagesse qui devient audible pour l'oreille pensante.
La musique peut être beaucoup plus qu'un agréable élément ornemental. Elle exige un parfait équilibre entre intellect, émotion et tempérament. Si l'on parvenait à cet équilibre, les hommes et même les nations pourraient interagir plus facilement.
Si le West-Eastern Divan Orchestra est évidemment incapable d'apporter la paix, il peut cependant créer les conditions d'une compréhension sans laquelle il est impossible de parler de paix. Il a la faculté d'éveiller la curiosité de chaque individu, de l'inciter à écouter le récit de l'autre. Puis, lorsqu'on a entendu l'inacceptable, il devient possible d'accepter la légitimité du point de vue de l'autre. ».
D. B.
C'est la guerre. Une guerre qui se déroule sur tous les fronts et qui s'intensifie depuis qu'elle est désormais menée contre tout ce dont il paraissait impossible d'extraire de la valeur. S'ensuit un nouvel enlaidissement du monde. Car, avant même le rêve ou la passion, le premier ennemi aura été la beauté vive, celle dont chacun a connu les pouvoirs d'éblouissement et qui, pas plus que l'éclair, ne se laisse assujettir.
Y aura considérablement aidé la collusion de la finance et d'un certain art contemporain, à l'origine d'une entreprise de neutralisation visant à installer une domination sans réplique. Car beauté et laideur constituent des enjeux politiques. Dans sa quête éperdue de Ce qui n'a pas de prix, Annie Le Brun se livre à une impitoyable critique des mécanismes par lesquels la violence de l'argent travaille à asservir notre vie sensible.
Saviez-vous que le "cinéma 3-D" existait dans les années 1920 ? Connaissez-vous les vraies raisons qui ont poussé les films à devenir parlants ? Illustrations à l'appui, ce livre fournit des clés d'analyse de près de 130 ans d'histoire d'une industrie considérée à la fois comme un art et comme un média. Dans un style simple et didactique, les auteurs donnent les repères essentiels du cinéma dans le monde, des origines à nos jours, et abordent les dernières découvertes et les cinématographies méconnues.
A quoi reconnaît-on un film expressionniste ? Comment envisageait-on le montage dans les années 1900 ? Et qu'est-ce qui change à l'arrivée du numérique ? Une synthèse remarquable, qui permettra au grand public aussi bien qu'aux étudiants et aux cinéphiles de comprendre ce qui se trame derrière le grand écran ! Première parution : Pluriel, 2017.
« Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la musique sans jamais oser poser les questions. ».
« La musique est l'art des sons. » De cette définition banale, retenue d'une leçon d'enfance, ce livre tire toutes les conséquences. Chemin faisant, il répond aux questions les plus simples et les plus profondes sur la musique et sur les arts. Pourquoi, partout où il y a de l'humanité, y a-t-il de la musique ? Pourquoi la musique nous fait-elle danser ? Pourquoi nous émeut-elle ? Et qu'est-ce que la beauté ?
Le 29 mai 1982, Romy tire sa révérence, dans le silence d'une nuit d'été parisienne, dans l'intimité d'une chambre qui n'est pas la sienne, tapie à l'abri des regards comme un animal blessé. Ses derniers jours et son départ restent aussi méconnus que fascinants. C'est sur eux que Sarah Briand se penche dans ce livre intime.
Le 29 mai 1982, Romy Schneider s'est éteinte à l'âge de 43 ans. Que s'est-il passé la nuit de sa mort rue Barbetde-Jouy, dans le VIIe arrondissement de Paris ? Icône du cinéma français à la photogénie incroyable, que sait-on vraiment de Romy, de ses bonheurs, mais aussi de ses chagrins et de ses blessures, notamment depuis la mort de son fils quelques mois plus tôt ?
Sarah Briand a marché dans ses pas, du chalet de son enfance à Berchtesgaden en Allemagne, près du nid d'aigle d'Adolf Hitler, jusqu'à l'appartement parisien où elle a passé ses dernières heures, pour nous livrer une série d'instantanés de ces moments intimes.
Un portrait nourri de témoignages inédits d'amis, de réalisateurs, ses partenaires de cinéma et parfois de vie, comme celui qui fut son époux, Daniel Biasini, le père de sa fille Sarah, ou encore Alain Delon, qui rend pour la première fois un hommage exceptionnel à la femme qu'il a aimée.
L'orchestre, comment ça marche ? Quels sont les rouages de cette étrange communauté humaine et musicale ? On la perçoit comme une masse indifférenciée mais on oublie trop souvent qu'il s'agit d'une réunion d'individualités. Qui sont ces musiciens d'orchestre, ces anonymes, dont on oublie qu'ils sont de grands musiciens ? Paradoxe vivant - artistes mais aussi salariés, interprètes mais aussi exécutants, aristocrates mais aussi prolétaires -, est-ce par vocation ou par défaut qu'ils font ce métier ? Comment s'organise cette communauté fortement structurée et hiérarchisée, avec en point culminant le rapport au chef d'orchestre ?
L'orchestre peut être le paradis ou l'enfer ; ses membres sont des êtres humains, avec leurs forces, leurs travers, leurs diversités, mais lorsqu'ils communient pour le même objectif, on se trouve devant la plus magique des inventions.
Le livre de Neil Postman est un classique de l'étude de l'impact des médias sur la société.
Refusant les thèses de la manipulation, il montre que pour l'essentiel les médias agissent moins en fonction des contenus qu'ils transmettent qu'à travers la forme de cette transmission : celle de programmes qui visent essentiellement le divertissement. Rappelant que la construction de l'espace public démocratique fut étroitement liée à la diffusion de l'écrit, il montre comment la concurrence que lui fait le divertissement audiovisuel ruine progressivement cet espace public de discussion au profit d'un espace public voué à la distraction, où tout se vaut.
Dans le même temps où l'enfance se voit dénier son insouciance et la liberté de s'amuser, les adultes sont traités comme des enfants et priés de se divertir sans rien prendre au sérieux. Ces analyses invitent à réfléchir sur la responsabilité qui est la nôtre dans ce que Michel Rocard, dans sa préface, appelle un combat de civilisation.
Cet ouvrage, désormais classique, met en lumière les trois inventions simultanées de l'abstraction, dans les oeuvres de Kandinsky, Mondrian et Malévitch. Dora Vallier souligne la rigueur et la logique de démarches qui les conduisent à dissocier la peinture de la figuration, le premier en radicalisant une quête spirituelle, le second en approfondissant la recherche de la matière picturale engagée par le cubisme, le troisième en recherchant les unités minimales de la couleur dans un équivalent plastique de la phonologie.
L'auteur présente ensuite les développements de l'abstraction dans la peinture, avec Delaunay, Herbin, pour aboutir à l'expressionnisme abstrait américain et à l'école de Paris. Elle évoque aussi longuement ses effets dans la sculpture de Arp et Schwitters, jusqu'à Moore et Calder.
Cette introduction à l'art du XXe siècle met ainsi en lumière le chemin qui a conduit d'une tentative de faire de l'art un vecteur de connaissance à la recherche d'une expression de la sensibilité la plus intime.
Personne n'a vraiment intérêt à voir les médias rapporter la situation du Yémen de l'intérieur comme de l'extérieur. Après avoir essayé pendant plus d'un an d'obtenir les autorisations et les visas nécessaires pour se rendre dans le nord, Véronique de Videguin et ses équipières ont décidé en octobre de se rendre dans le sud Yémen et de passer illégalement dans le nord, seule solution pour y pénétrer. Elles ont ensuite été coincées dans le nord pendant un mois, à cause notamment du blocus de l'Arabie Saoudite. Pourchassées par les Houthis et sous la protection d'Amat et ses ministres, elles ont finalement pû nous rendre à Saada, Hajjah, Ibb et Sanaa pour réaliser ce reportage sur la situation des Yéménites du nord.
Cet ouvrage s'adresse au grand public aussi bien qu'aux étudiants et aux cinéphiles. Il explique, illustrations à l'appui, plus de cent vingt ans d'histoire d'une industrie considérée à la fois comme un art et comme un média. Donnant les repères essentiels - des origines du cinéma à nos jours - dans le monde, il aborde les dernières découvertes et les cinématographies méconnues. Il livre aussi des outils d'analyse et de compréhension : à quoi reconnaît-on un film expressionniste ? Comment envisageait-on le montage dans les années 1900 ? Quelle révolution des images animées entraîne vraiment le numérique ? Une brève histoire du cinéma permet de saisir l'évolution des techniques et les enjeux qui régissent le monde du cinéma : une synthèse indispensable pour savoir ce qui se trame derrière le grand écran !
C'est à travers des photos conceptuelles que Mahmoud Alkurd nous fait partager sa propre vision de la catastrophe qu'ont subie les Palestiniens dans la bande de Gaza lors de l'attaque d'Israël en 2014, Bordure de Protection. Les récits très réalistes de l'écrivain Mo'men Ashour, tirés de faits réels, apportent la consistance du vécu traumatique à ces images poïétiques. Aujourd'hui, la situation géopolitique et humanitaire n'a pas changé.
Jean Paul Olive présente dans cet album une nouvelle odyssée argentique, aventure d'un voyageur infatigable, à contre-pied du tout numérique. La réalité n&b, en images fortes de la Grèce assise sur son passé questionne le présent. Le jeu de la marelle à cloche-pied de terre à mer, de personnages à paysages, de lutte entre ombre et lumière, fait échos aux mots de Blaise Cendrars, lançant ses chaussures par-dessus bord, pour aller au bout de ces îles inoubliables.
Une fièvre mondiale fait exploser le prix des oeuvres : la ruée vers l'art ne connaît pas de limites. Le monde de l'art est devenu le terrain de jeu des puissants de la planète : grands collectionneurs, gérants de fortunes, galeristes internationaux, maisons de vente aux enchères mondialisées.Ce n'est plus la valeur artistique d'un tableau oeuvre de l'esprit qui retient l'attention, c'est d'abord son prix, sa valeur marchande. Dans ce monde qui fonctionne à l'envers, le délit d'initiés n'est pas interdit, il est même recommandé.
Pour percer à jour les Grands et les Petits Secrets de cet univers opaque qui voudrait bien le rester ! et révéler ses codes et ses rites aux non-initiés, Danièle Granet et Catherine Lamour ont conduit une vaste enquête aux quatre coins du monde.
Édition actualisée Danièle Granet a fait toute sa carrière dans la presse écrite de L'Express à Novapress. Catherine Lamour a créé et dirigé le département des documentaires de Canal +.
Apparus il y a trois siècles en Russie, les Doukhobors formaient une communauté pacifiste qui rejetait la liturgie de l'Église et s'opposait à tout gouvernement civil. Leur histoire a ainsi été faite de persécutions, de privations de liberté et de déportations. Malgré les conditions difficiles qui leur furent imposées, ils restèrent fidèles à leurs convictions : exilés de Crimée en Géorgie, ils fondèrent plusieurs villages dans la région de Jakhaveti. Mais pour fuir les représailles, une partie importante de la communauté choisit de partir pour le Canada au début du 20ème siècle, soutenue par Tolstoï et ses partisans.
La cinéphilie fut une passion française dévorante et exigeante. Elle a, pour une bonne part, « fabriqué » Alfred Hitchcock, Howard Hawks, Roberto Rossellini, Jean Renoir et autres cinéastes, les consacrant comme artistes majeurs du XXe siècle. Ces jeunes mordus de cinéma s'appelaient André Bazin, Éric Rohmer, Henri Langlois, François Truffaut, Jean-Luc Godard, Jacques Rivette, Claude Chabrol, Serge Daney. Fondé sur l'étude de leurs archives privées et des revues qu'ils animèrent, cet essai propose la première synthèse sur la cinéphilie française en son âge d'or. Une manière d'illustrer une autre histoire culturelle de notre temps.
Les photographies de ce livre sont le résultat de trois années de voyage à Alger. Le photographe a pris le parti d'utiliser la technique du polaroid. Pour chaque portrait, il a offert l'instantanée au sujet et gardé le négatif, comme un envers du décor, immémorial et révélateur de la réalisation de ce travail.
Il fut une époque, de la Renaissance au début du xxe siècle, où les architectes avaient pour mission d'ennoblir les palais, les lieux de culte et les résidences des puissants, conférant aux villes occidentales leur dimension esthétique. La modernité au xixe siècle rompt avec ces pratiques au profit de conceptions davantage fonctionnalistes, poussées à l'extrême par Le Corbusier. Doit-on pour autant aujourd'hui renoncer à tout idéal d'aménagement harmonieux ? Pour renouer avec le souci d'embellir, il faut bien plus admettre que tout projet d'urbanisme a une dimension sociale. Cette hypothèse est le point de départ d'une histoire passionnante de l'urbanisme européen.
Dans une sélection de ses photographies est consacrée à la richesse et à la diversité des intérieurs d'immeubles : halls et cages d'escaliers. Elle s'attache à mettre en valeur un patrimoine beaucoup moins visible que les façades, selon des angles et des perspectives inédites qui tiennent pour une large part à la capacité de création ou de recréation artistique du photographe.
Les historiens parlent du surréalisme comme du mouvement littéraire et artistique le plus important du siècle. mais qui nous dira à quoi ressemblait vraiment la révolution surréaliste ? que voulait cette poignée d'artistes et d'écrivains qui, non contents de chercher à « tuer l'art », se targuaient d'être des « spécialistes de la révolte » et proclamaient sur la couverture du premier numéro de leur revue : « il faut aboutir à une nouvelle déclaration des droits de l'homme » ? breton avait placé le manifeste du surréalisme sous le signe du non-conformisme absolu. seule une histoire absolument non conforme pouvait restituer l'enjeu de cette révolte hors du commun.
Une postface actualise la réflexion historique en montrant pourquoi le triomphe de l'art surréaliste devait non seulement tuer la révolution surréaliste, mais en effacer la mémoire.
« J'ai éparpillé mes considérations sur la musique dans la série de mes journaux hédonistes. Ici, sur l'essence de la musique, là, sur un certain nombre d'opéras qui fonctionnent à mes yeux comme des prétextes à penser, ailleurs, sur des amis compositeurs de musique contemporaine, mais je n'avais jamais consacré un livre à ce seul sujet.
Voici donc ce livre auquel j'ai souvent pensé, un échange à deux voix qu'il faut lire comme on écouterait un genre de pièce de musique de chambre, non loin du feu crépitant d'une cheminée, en compagnie de deux ou trois amis choisis, avec une belle bouteille d'un grand et vieux bon vin, dans la pénombre d'une pièce juste éclairée par l'âtre. Un genre de petite musique... » M. O.
Pourquoi photographier les amoureux ? Sans doute suis-je comme le personnage de Prévert dans son poème pour toi mon amour, et pour l'imiter je pourrais écrire que je photographie pour toi, je photographie pour moi... Et dans mes déambulations citadines, dans mes voyages, n'importe où, je guette, chaque fois que je le peux, des signes de cet amour.
« La nuit, Giacometti prenait ses quartiers dans des bars de Montparnasse. Chez Adrien avait sa préférence pour la jovialité des filles. Parmi celles-ci, il y avait Ginette et Dany, des demoiselles simples, un rien débauchées. Elles lui donnaient avec respect du "monsieur Albert". Un soir, il n'avait pas tout de suite remarqué la petite dernière qui se prénommait Caroline. Elle se différenciait des autres par un éclat certain et un naturel désarmant. Elle était aussi beaucoup plus jeune, vingt ans à peine. Alberto et Caroline ne se quitteront plus jusqu'à la mort de l'artiste. Ils vivront un amour fou, un amour noir. Elle deviendra sa muse et son dernier modèle. » F. M.
Franck Maubert a rencontré Caroline à Nice. Il restitue son histoire inédite qui dévoile un pan méconnu des dernières années de l'artiste.